Il y a de cela maintenant quelques années, Dominique Foisy-Geoffroy m’invitait à participer à un colloque sur le Québec des années 1950, organisé par la Société du patrimoine politique du Québec. Il me demandait de préparer quelque chose sur la banlieue durant cette première décennie des Trente Glorieuses. J’avais plusieurs autres projets en chantier, dont la révision finale de mon ouvrage sur les banlieues bourgeoises de Montréal, mais j’ambitionnais depuis un certain temps de jeter un oeil à cette période de massification du phénomène suburbain, qui était en quelque sorte l’antithèse des banlieues élitaires que j’avais étudiées dans Des sociétés distinctes. Je me suis donc limité, à l’époque, à examiner de plus près la publicité consacrée à la vente de résidences dans les lotissements suburbains dans la presse montréalaise francophone des années 1950. Cela a pris plus de temps que je l’aurais voulu, mais, dans les années qui ont suivi cette première communication, j’ai eu l’occasion de bonifier considérablement ce corpus et l’analyse que j’en ai faite. De plus, grâce à l’appui du Laboratoire d’histoire et de patrimoine de Montréal (et plus spécifiquement de Kim Petit et de Laura Barreto, dont je ne cesserai jamais de chanter les louanges!), j’ai été en mesure de géolocaliser les données rassemblées à l’occasion de ce projet.
L’article tiré de ce projet paraîtra dans le prochain numéro de la Revue d’histoire de l’Amérique française, mais, entre-temps, il est possible de consulter une partie de mon corpus, en données ouvertes, via la plateforme SCHEMA (Système de cartographie de l’histoire de Montréal) du LHPM. Ces données permettent de voir à quel point, au-delà de la façon dont le rêve suburbain est mis en marché à l’époque, il l’est en fonction d’une certaine ségrégation linguistique de l’espace, qui reproduit et prolonge celle que l’on observe dans la ville centrale. Ces données permettent également de voir comment les inégalités économiques présentes dans la ville centrale se prolongent également en banlieue, tous les bungalows n’étant pas égaux.